Partons à la rencontre de Constance Guisset, designer française connue et reconnue…
1 – Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Enfant, je rêvais d’un métier à la fois manuel et intellectuel, chirurgien par exemple. Je faisais déjà du bricolage mais je ne m’imaginais pas encore designer. J’ai étais prise dans le flot des études, d’abord commencé dans une école de commerce, avant de me dire que je préférais travailler dans la culture. Je me suis alors orientée vers Sciences Po. A la fin de mon master, je me suis aperçue que je ne voulais pas seulement accompagner la création mais bien plutôt être au cœur du processus créatif.
J’ai commencé intégré l’ENSCI et je suis devenue en même temps administratrice des frères Bouroullec pendant près de sept ans. Une fois sortie de l’école, j’ai présenté plusieurs concours et fondé mon studio un peu plus tard.
2 – Comment définiriez-vous votre travail ?
Mouvement, légèreté, rêve, illusion, humour.
3 – Pouvez-vous nous parler de votre équipe ?
Je suis entourée de quatre fabuleux collaborateurs : deux designers, un architecte et une administratrice. Des intervenants ponctuels viennent parfois s’ajouter, ainsi que des stagiaires. Nous menons de nombreux projets à la fois, avec des temporalités différentes… et je navigue de l’un à l’autre en continu.
4 – Pouvez-vous nous montrer votre espace de travail ?
Mon studio se trouve dans le 18ème arrondissement de Paris. Il se divise en plusieurs espaces, dont une partie atelier dédiée à la recherche, ainsi qu’un espace sous une grande verrière, ce qui nous permet notamment de profiter de la lumière naturelle pour nos shootings photo.
5 – Quel est le rôle du designer d’après vous ?
Les designers ont une responsabilité dans la société de consommation actuelle. Face à l’afflux d’objets, nous continuons d’en inventer et de les dessiner. Il faut donc faire des objets à dessein, en adéquation avec notre vision du monde. Les designers ont également une certaine capacité à transformer le monde dans lequel nous vivons. Ils peuvent proposer des objets plus légers et étonnants qui deviennent des supports pour l’imaginaire.
6 – Le métier a t-il évolué depuis le début de votre carrière ?
Il y a eu de nombreux changements, en particulier du point de vue des techniques. Les imprimantes 3D comme les fablabs sont source de nouvelles opportunités. Le monde de l’édition change également, avec de nouveaux acteurs. Les objets qui nous sont demandés aussi changent avec les nouveaux services, les nouveaux besoins etc. Sans parler de la dimension environnementale de la production et de l’objet…
7 – Sur quel projet travaillez vous actuellement ?
Différents objets sont en cours. Une boîte en céramique vient d’être éditée chez Bosa. Nous allons commencé une collaboration avec la marque chinoise Zaozuo.D’autres projets paraîtront cette année, mais il est encore trop tôt pour en parler.
Nous travaillons également sur plusieurs scénographies : celle de l’exposition Persona étrangement humain au musée du quai Branly (du 26 janvier au 13 novembre), de l’exposition Tenue correcte exigée au musée des Arts décoratifs (du 1er décembre 2016 au 23 avril 2017) ou encore celle du spectacle Mise en scène de la compagnie de danse Wang Ramirez (la première aura lieu au Théâtre de l’Archipel à Perpignan le 9 février)
Deux expositions seront également consacrées à mon travail cette année : une au Château de Courcelles à Montigny-les-Metz (du 14 mai au 3 juillet) et une autre au MUDAC à Lausanne (du 14 septembre 2016 au 8 février 2017). Une monographie sera publiée à cette dernière occasion. Mes créations seront également exposées au MAXXI à Rome dans le cadre de l’exposition Local Icons (du 5 au 28 février) et au Havre durant le festival Une saison graphique (du 21 mai au 11 juin).
8 – De quel projet êtes-vous la plus fière ?
C’est difficile à dire. Je ne tire pas particulièrement de fierté des objets eux-mêmes, sauf dans le temps immédiat après leur sortie parce que je suis encore sous le coup de leur sortie et de l’énergie énorme qu’il a fallu développer pour y parvenir. En réalité, je suis heureuse quand les objets deviennent réels et rencontrent leur public. La façon dont le public s’est approprié la lampe Vertigo me touche particulièrement. J’ai le sentiment qu’elle appartient maintenant davantage à chacun.
Si je suis fière de quelque chose, c’est plus de l’esprit avec lequel nous travaillons au sein de l’agence: avec plaisir, simplicité et efficacité. J’apprécie beaucoup mon équipe et je suis heureuse que nos interlocuteurs nous disent souvent à quel point ils apprécient travailler avec nous.
9 – On vous connait aussi pour votre Suspension Vertigo chez Petite Friture, pouvez-vous nous en dire plus sur ce projet ?
Vertigo est née alors que j’étais encore élève à l’ENSCI, alors que je travaillais sur le thème de la cabane. Vertigo est la tentative de circonscrire un espace d’intimité. Après l’avoir longtemps défendue à l’édition, j’ai rencontré Amélie du Passage qui fondait alors Petite Friture. Nos points communs étaient nombreux : nos âges, nos parcours, nos envies…
Vertigo est devenu mon premier objet édité et aussi la première édition de Petite Friture. Sa taille est imposante, mais elle est très légère et se replie, ce qui permet de la transporter facilement. Son mouvement invite à la rêverie. Son édition a aujourd’hui cinq ans. Sa production reste la même : elle est réalisée en France, à la main.
10 – Avez-vous un projet resté dans les tiroirs en qui vous croyiez ?
Fiat Lux, une lampe dont l’interrupteur lévite quand elle est allumée, un projet auquel je crois profondément. L’investissement lié au développement d’une technologie innovante peut rendre le projet délicat. Mais nous nous y sommes remis récemment et j’espère que nous allons y arriver !
11 – Quels seraient vos conseils adressés à la jeune génération de designers ?
Être curieux !
12 – Pensez-vous qu’il y a un problème dans la valorisation du design en France ?
Le design en France est très dynamique et foisonnant. J’ai l’impression qu’il y a de nombreuses tendances et directions qui sont explorées aujourd’hui. Cela crée une forte émulation.
En revanche, je pense que le design n’est pas encore suffisamment intégré dans notre culture. Nous avons besoin d’apprendre à apprécier des objets beaux et bien conçus. Le choix d’un objet doit être un acte délibéré et non pas un geste impulsif, quelque chose qu’on utilise et jette ensuite. Mais je suis confiante, nous sommes sur la bonne voie !
13 – Attachez vous du temps et importance aux jeunes, conseils, formations, voir prise en stage dans votre studio… ?
La transmission est très importante pour moi. J’ai l’occasion de rencontrer de jeunes designers lors de jury, par exemple Vitrine pour un designer dont je suis la présidente cette année, ou quand j’encadre des diplômes. Mon studio accueille régulièrement des stagiaires, de la 4ème au master. C’est toujours un plaisir de faire découvrir son métier, de transmettre son savoir et de soutenir la jeune création.
14 – Le design est aussi fait de rencontre, auriez-vous un artisan, un atelier à nous faire découvrir, avec lequel vous avez peut-être collaboré ?
Frédéric Julia et toute l’équipe de Air 5 Events ! Il est spécialisé dans la création de structures gonflables depuis 30 ans. Son savoir-faire m’a permis de rendre réelles certaines de mes envies de mouvement et de légèreté.
Nous en sommes à notre troisième collaboration. Après avoir travaillé ensemble sur une scène itinérante pour Hennessy, puis sur l’exposition de l’École des Loisirs, nous sommes en ce moment en train de finaliser la scénographie du spectacle Mise en scène, de la compagnie de danse Wang Ramirez. Je suis certaine que ce n’est qu’un début !
15 – Un lieu fétiche à nous faire partager ?
La ménagerie du Jardin des Plantes et le muséum d’Histoire naturelle.
16 – Auriez-vous un designer à nous conseiller pour notre prochaine interview ?
Il y a de nombreux designers talentueux, mais je travaille en ce moment essentiellement en collaboration avec Agnès Dahan, une formidable graphiste. Nous travaillons en collaboration depuis longtemps, en général sur des scénographies. Cette année, nous allons vivre de nouvelles aventures : c’est Agnès qui réalise le graphisme de la monographie publiée pour le MUDAC. Nous avons également été invitées par le festival Une saison graphique au Havre pour une exposition graphique. Je m’en réjouis !
Merci à Constance pour sa disponibilité et gentillesse, designer accessible rencontré lors du workshop Ultralin du côté de L’ENSAD Paris.
Plus d’informations sur la designer : Constance Guisset (consulter son site)
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Bonjour, Bravo pour toutes ces réalisations. Je suis une fan inconditionnelle des réalisations de constance Guisset, on parle beaucoup de Vertigo mais j’ai un vrai coup de coeur pour la suspension cape bien moins mise en avant : http://www.ksl-living.fr/suspension-cape-design-constance-guisset-1947.html
JE NE SUIS PAS D-VIN …… COMMENT cette obsédée du cercle et de la couleur (cercle chromatique) a pu dessiné une machine à vin D Vine aussi carré et aussi neutre ? http://www.constanceguisset.com/sites/default/files/styles/product_full/public/products/10-vins_process.jpg?itok=2YrPLMjG
Encore aujourd’hui dans le facebook de BED , c’est Vertigo que l’on commente comme un coup de foudre, un desir irréprescible pour ne pas dire un must have feminin. Ma femme , qui adooore les chapeaux extravageants en direct du prix de Diane, en est folle ….. Que serait devenu Petite friture sans Vertigo et Constance Guisset sans Vertigo ? Pour comprendre son succès, il faut plus revenir à Jean Paul Goude qu’au 10 principes du Good design de Dieter Rams …https://pbs.twimg.com/media/CYBuv94WkAEsobV.jpg
Je n’aurais jamais pensé que la petite entreprise curieusement brandé à la française « petite friture » dirigeait par Amelie Du passage ex HEC School of Management Paris, avait le double de citations dans Google que Constance Guisset ex de Essec . Comme quoi la hierarchie des grandes écoles de COMmerce est parfaitement respectée.
LE CERCLE DES BRAS DROITS DISPARUS…. DU DESIGN ? »Je suis entourée de quatre fabuleux collaborateurs : deux designers, un architecte et une administratrice. » J’aime bien que les designers connus donnent des noms à leurs bras droits et pas simplement des prenoms , des professions , des qualificatifs …. Il n’y a que des femmes? Ce qui conduit il pas à une sorte gender design qui est une partie du territoire de Constance Guisset face à IngaSempé et à Matali Guisset , les designers les plus cités et les plus connus ?